Avant Rachida Dati en France, la nouvelle ministre de l’Intégration et de l’Egalité des sexes du gouvernement suédois est une jeune dame d’origine Africaine .
En 1981, à l’âge de 12 ans, Nyamko Ana Sabuni, c’est son nom, est arrivée en Suède avec sa mère et trois de ses cinq frères et soeurs pour y rejoindre son père, un opposant politique plusieurs fois emprisonné dans son pays d’origine le Congo
"Mon père et ma mère sont immédiatement entrés dans la vie active (...) ce qui fait que pour nous, il n’y a rien eu de bizarre", raconte-t-elle. " Les parents travaillaient, nous allions à l’école et la vie suivait son cours", ajoute la ministre dont l’intégration semble exemplaire et dépourvue de traumatisme. "Je suis très fière de mes racines, je n’ai jamais eu de problème d’identité", résume-t-elle. A Kungsängen (20 km de Stockholm) "nous étions la seule famille d’immigrés visible", dit-elle. L’apprentissage du suédois lui a suffi pour se fondre dans son pays d’accueil.
Actuellement âgée de 37 ans, elle a d’abord siègé au Parlement où elle a beaucoup fait parler d’elle en proposant un ensemble de mesures pour combattre la "culture de l’honneur". Cette notion englobe tout ce qu’une femme doit subir sans se plaindre : examens de virginité, port du voile, excision, mariages forcés, violences physiques, etc.
"Je ne pense pas faire mon travail très différemment de quelqu’un d’autre simplement parce que je suis noire, mais peut-être plutôt à cause de certains points de vue que j’ai (...), cela est plus déterminant", affirme-t-elle en suédois, la langue qu’elle parle en famille, en alternance avec le swahili.
Désormais sortie des rangs de l’opposition et à la tête d’un ministère cumulant l’Intégration et l’Egalité entre les sexes, dans le nouveau gouvernement de centre-droite, Nyamko Sabuni, qui reçoit dans son bureau coquet et sans luxe apparent, souligne que son rôle a changé. "J’ai joué mon rôle, j’ai initié un débat. En tant que ministre je vais appliquer la politique sur laquelle nous sommes tombés d’accord", dit-elle. La coalition qui a détrôné les sociaux-démocrates suédois aux législatives de septembre est formée de quatre partis. Mais "je dis aussi avec honnêteté comment sont les choses : je crois toujours en ces propositions et les problèmes demeurent", lance cette femme élégante au regard franc et à l’air assuré.
Selon Nyamko Sabuni, le marché du travail et la société suédoise permettaient dans les années 80 aux immigrés de s’intégrer plus facilement qu’actuellement.
Aujourd’hui, la création d’emplois, des cours de langue adaptés et la lutte contre la discrimination sont les clés de l’intégration, estime-t-elle.Elle reproche à la Suède d’avoir longtemps appliqué une politique d’assistanat qu’elle espère que le nouveau gouvernement va réussir à rompre. "Pour moi, en tant que libérale, il est très important que (les gens) sachent qu’ici, ils ont des possibilités et des avantages, mais aussi des obligations et des exigences", explique cette mère de famille mariée à un Suédois.
Farouchement opposée aux pratiques culturelles ou religieuses quand elles ne respectent pas la constitution et les droits de l’Homme, Nyamko Ana Sabuni avance qu’à l’heure actuelle, environ 100.000 filles en Suède subissent la fameuse "culture de l’honneur".|